Vice caché ou vice non révélé (Me Damien Jost)

avril 29 14:47 2020

Face au diagnostiqueur, le propriétaire n’est pas toujours transparent et peut parfois dissimuler des informations pourtant essentielles à la réalisation des diagnostics. Contrairement à une idée reçue, le donneur d’ordre est cependant tenu de coopérer loyalement avec son prestataire. Explications de Me Damien Jost.

Me Damien Jost, avocat au barreau de Paris.

« Estimant que c’est au professionnel du diagnostic de « faire son travail », certains propriétaires donneurs d’ordre (particuliers voire professionnels), oublient de révéler à l’opérateur ce qu’ils savent du passé du bien (infestation, traitement, présence d’amiante, etc.). Attitude gravissime, puisqu’elle prive l’opérateur d’informations essentielles à l’accomplissement de sa mission (sans même que celui-ci en ait eu conscience lors de l’examen des lieux). L’on peut même se demander si certains clients ne vont pas jusqu’à instrumentaliser le diagnostic – et l’assurance qui s’y trouve associée – afin de se procurer un recours commode (voire un alibi) en cas de litige avec l’acquéreur.

Pour l’opérateur, difficile de se prémunir contre ce type de comportement, sauf à partir du principe que le client n’est pas loyal, sauf exception. En cas de litige, ce client prétendra souvent n’avoir rien dit à son prestataire parce que celui-ci ne l’a pas interrogé, ou même, parce qu’il pensait que le problème était réglé, puisque l’opérateur n’a rien décelé, alors qu’il est censé être un « homme de l’art » (comme si l’opérateur était voué à se transformer en un détective d’un nouveau genre).

Plus grave encore, l’acquéreur du bien, lorsqu’il sera confronté à un vice non révélé par le diagnostic, choisira souvent de se retourner contre le seul opérateur en épargnant le vendeur, estimant que celui-ci est forcément de bonne foi. Or, contrairement à ce que certains vendeurs (voire certains agents) peuvent penser, le donneur d’ordre ne saurait se dispenser de coopérer loyalement avec son prestataire (encore faut-il, naturellement, que le vendeur soit physiquement présent lors du diagnostic).

Lorsque la mauvaise foi du vendeur parvient à être établie par l’opérateur, le tribunal n’hésite pas à sanctionner le vendeur « calculateur » (même si l’on peut regretter que la jurisprudence soit encore aussi rare dans ce domaine). Voici quelques années, un vendeur « malicieux » fut épinglé sévèrement par le juge pour avoir camouflé des indices d’infestation de termites, puis avoir utilisé le diagnostic négatif lors de la vente (Cass. 19 nov. 2008 : n° 07-17.880).

L’acquéreur ayant attaqué le vendeur après avoir découvert une infestation, le vendeur n’a pas hésité à se retourner contre l’opérateur et son assureur. Mauvais calcul. Le juge a rejeté le recours du vendeur contre son prestataire, tout en condamnant le vendeur à « garantir » le professionnel trompé.

Pour se prémunir contre de tels agissements, l’opérateur se doit d’inviter fortement son client à coopérer loyalement avec lui, l’idéal étant de faire remplir un questionnaire par celui-ci, soit lors de la rencontre sur le terrain, soit, au plus tard, lors de la réception du rapport (en précisant dans ce cas que toute dissimulation d’information « critique » pourra être judiciairement sanctionnée). »

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