Le mesureur condamné à indemniser le vendeur au titre de la perte de chance

Selon une jurisprudence solidement établie, la diminution du prix de la vente en cas d’erreur de mesurage ne constitue pas un préjudice indemnisable et le diagnostiqueur n’a pas à la supporter. Mais le professionnel n’est pas à l’abri pour autant et peut se voir condamné à de substantielles indemnités.

En septembre, un mesureur s’était vu condamné à 5  000 euros au titre de dommages et intérêts, par la Cour d’appel de Paris (notre article). Fin janvier, la Cour de Cassation vient d’apporter un nouvel exemple, confirmant la condamnation d’un mesureur : cette indemnité n’est pas liée au montant réglé par le vendeur à l’acquéreur, mais aux conséquences de sa faute.

La vente conclue en 2010 portait sur un appartement et une cave pour un montant de 335 000 euros. L’acte de vente mentionne une superficie de 63,10 m2, mais quelques mois plus tard, un second mesurage ramène la superficie à 59,67 m2. Sans être astronomique, l’erreur est supérieure à un vingtième (5,52%), et le vendeur a donc logiquement dû restituer à son acquéreur la somme de 18 511 euros au titre de la réduction de prix correspondant à la différence de surface. Et comme souvent, le vendeur a donc tenté de rechercher la responsabilité du mesureur en réparation de son préjudice.

Devant la Cour d’Appel de Paris en septembre 2013, la société de diagnostics avait été condamnée à verser près de 18 000 euros à titre de dommages-intérêts ; une somme quasiment identique à celle restituée par le vendeur. La société de diagnostic s’est donc pourvue en Cassation, rappelant que la perte de chance de vendre le bien au prix initial ne pouvait constituer un préjudice indemnisable.

La Cour de Cassation a toutefois rejeté le pourvoi. « Si la restitution, à laquelle le vendeur est tenu en vertu de la loi à la suite de la diminution du prix résultant d’une moindre mesure par rapport à la superficie convenue, ne constitue pas, par elle-même, un préjudice indemnisable permettant une action en garantie, le vendeur peut se prévaloir à l’encontre du mesureur ayant réalisé un mesurage erroné, d’une perte de chance de vendre son bien au même prix pour une surface moindre. »

Autrement dit, le mesureur est condamné parce que le vendeur a perdu toute chance de vendre à un prix identique, l’acquéreur s’intéressant avant tout à un logement et non une superficie. Ce qui est très valable dans les zones tendues, et qui pourra être d’autant plus facilement invoqué que l’erreur de mesurage est modeste (5,52% dans ce cas). Non seulement, le mesureur peut se voir condamné, au titre de la perte de chance, mais il peut aussi se voir condamné aux nombreux frais inhérents à la procédure résultant de son erreur (expertises, nouveaux mesurages, frais occasionnés par le vendeur pour trouver la somme nécessaire à la restitution…).

Consulter l’arrêt sur le site de la Cour de Cassation et Legifrance

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