Amiante : le diagnostiqueur rattrapé par un diagnostic réalisé en… 1999

Amiante : le diagnostiqueur rattrapé par un diagnostic réalisé en… 1999
mars 19 15:43 2019

Presque vingt ans plus tard, un bureau de contrôle a été condamné par la cour d’appel d’Angers pour un diagnostic amiante erroné.

La vente de ce bâtiment industriel de quelque 3000 m2 remonte à juin 1999. Annexé à l’acte authentique, un diagnostic certifie « l’absence de flocages, de calorifugeages ou d’amiante dans les faux-plafonds ». Quelques travaux sont réalisés, puis les locaux sont loués à un concessionnaire automobile. Quinze ans s’écoulent, et en 2014, à l’occasion d’un renouvellement de bail, un nouveau diagnostic amiante est effectué. Positif cette fois, il révèle la présence de matériaux et produits contenant de l’amiante. Bien que le bâtiment ait été construit en 1984, les analyses sont formelles, l’amiante est présent dans différents flocages.

La machine judiciaire se met en branle, le bureau de contrôle auteur du diagnostic de 1999 est assigné devant le tribunal de grande instance d’Angers. Montant de la réclamation ? Quelque 600 000 euros, tout de même. En première instance, les plaignants se verront toutefois déboutés : si le diagnostiqueur a bel et bien commis une faute dans l’exécution de sa mission, le TGI d’Angers estime que « le dommage constitué par la présence d’amiante par flocage et la nécessité de réaliser des travaux d’évacuation ou de confinement ne constituait pas un préjudice actuel et certain, ni même futur et certain ».

La cour d’appel d’Angers a infirmé le jugement. « S’il est exact que les flocages effectués à compter de 1980 ne devaient plus contenir d’amiante et que le bâtiment litigieux a été édifié en 1984, (la société de diagnostic) indique dans son rapport que le diagnostic visait à rechercher et localiser les flocages, calorifugeages et les faux-plafonds susceptibles de contenir de l’amiante. (…) (Le technicien) a conclu que l’aspect visuel des flocages, calorifugeages et/ou faux-plafonds permettait d’appliquer la notion de « zone homogène » à cet ensemble de locaux ne nécessitant pas de prise d’échantillons en l’absence de doute quant à la présence d’amiante. » La cour d’appel estime que « chargée d’une mission technique lui imposant un minimum de prudence, la société devait à tout le moins émettre des réserves. En évoquant une absence de doute, elle a incontestablement commis par négligence une erreur ».

Même si le désamiantage ne s’impose pas, en l’absence de danger pour la santé et l’environnement, la cour d’appel retient l’impossibilité d’effectuer des travaux ou d’entretenir le bâtiment sans toucher à l’amiante. Et puisque la société acquéreuse a investi dans des locaux dont elle avait l’assurance qu’ils ne contenaient pas d’amiante, la cour d’appel estime que « l’indemnisation du préjudice doit permettre de replacer la victime dans la situation où elle se serait retrouvée si le dommage ne s’était pas produit ». Le bureau de contrôle se voit ainsi condamné à verser 400 000 euros au titre du désamiantage auxquels s’ajoutent 111 000 euros pour les travaux de reconstruction avec de nouveaux matériaux.

Cour d’appel d’Angers, Ch. A, civ., 5 juillet 2018, n°16/01129.

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6 Commentaires

  1. polux
    mars 20, 18:01 #1 polux

    On ne peut plus donc se fier à rien….on prélève tout pour analyse, vraiment tout…

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  2. AMEingénierie
    mars 24, 16:44 #2 AMEingénierie

    Ce Diagnostiqueur s’est il bien défendu ?
    En effet il a commis une erreur en ne vérifiant pas le flocage de ce bâtiment industriel lors du diagnostic avant- vente (Décret 96-97) !
    – Mais le chef d’établissement, utilisateur du bâtiment, a t il fait réaliser le diagnostic pour la protection de ses travailleurs (Décret 96-98) ?
    – Qu’en est-il du constructeur de ce local qui n’a pas respecté la réglementation datant de 1977, relative au flocage ??
    – Enfin pendant toute cette durée d’utilisation, quid de la rénovation des diagnostics issus de l’évolution de la réglementation DTA ???
    L’article rapportant cette affaire est forcément résumé, mais … le jugement impute la faute au diagnostiqueur, hors sa faute est de ne pas avoir détecté la présence d’amiante dans le flocage, mais pas la présence de l’amiante, présence pour laquelle il est totalement étranger ! Le vendeur du local aurait dû subir une réfaction sur son prix de vente !!!
    L’histoire ne dit pas qui étaient les parties, soit, mais une fois de plus ce sont les assureurs des diagnostiqueurs qui paient, c’est à dire nous, diagnostiqueurs depuis 1996 ! (primes multipliées par 10 en maîtrise d’oeuvre et par 3 en diagnostics, pourtant sans sinistre.

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  3. KRISS2
    juillet 09, 08:12 #3 KRISS2

    .LOCATAIRE: Je vis dans un immeuble collectif depuis l’année de sa construction 1972. En mai un contrat avec Saint MACLOU payé d’avance me permettait de changer ma moquette usagée par du stratifié. Le poseur le 14 juin observe dans les dalles sous moquette une suspicion d’amiante. Sur mon insistance d’obtenir le DAPP, le bailleur m’envoie un diagnostiqueur à mon domicile. Celui ci n’utilise qu’un appareil et se balade dans toutes les pièces pour mesure. Ceci sans prendre l’échantillon de la dalle sous moquette que je lui présente pour analyse spécifique de la dalle sous moquette en question. Il m’est interdit par le bailleur d’appeler l’entreprise .
    Ma question: peut on se contenter d’un résultat (dans 10 jours) fiable sans aucun prélèvement d’échantillon spécifique ? SOS merci

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    • Christophe Demay
      juillet 09, 09:22 Christophe Demay Auteur

      Pour répondre à votre question. D’abord, le DAPP ne vous renseignera en rien sur la présence d’amiante dans les sols puisque ce diagnostic se borne à un repérage des flocages, calorifugeages et faux-plafonds. Deuxièmement, avant des travaux, avant une opération d’entretien et de maintenance dans un immeuble d’avant 1997, le propriétaire est tenu d’effectuer un repérage amiante avant-travaux pour évaluer le risque d’exposition à l’amiante. Dans le cas présent, reste à savoir s’il y a une intervention sur les dalles de sol, matériau susceptible de contenir de l’amiante. Enfin troisièmement, dans le cadre d’un repérage, l’opérateur ne peut conclure sur son seul jugement à la présence ou à l’absence d’amiante. Les critères pour conclure sont les suivants: matériau ou produit qui par nature ne contient pas d’amiante, marquage du matériau, document consulté, résultat d’analyse de matériau ou produit.

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  4. François-Félix BLANDIN
    septembre 08, 18:07 #4 François-Félix BLANDIN

    Je me souviens d’une situation que m’évoque cet article.
    1997, un diagnostic réalisé suivant les obligations du décrets 96-97 dans des bureaux en région parisienne.
    Construction de l’immeuble postérieure à 1980. En conséquence, nous n’avons pas prélevé le flocage en se référant clairement à la réglementation qui imposait le repérage de ceux réalisés jusqu’en 1980.
    Le client nous rappelle à la réception du rapport, et nous demande instamment de prélever ce flocage, à la limite de nous engueuler. En effet, les usagers, particulièrement inquiets à cette époque, ne se seraient pas contenté de ce simple aspect réglementaire.
    Nous sommes retournés sur place pour prélever un échantillon du flocage, évidemment le rapport d’analyse est revenu sans amiante.
    La morale, il vaut mieux prélever !
    De toute façon, une petite remarque, la réglementation mise en place pour le DTA a fait sauter cette date, puisque tous les flocages réalisés jusqu’en 1997 doivent être repérés et prélevés.

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  5. Boulasse
    septembre 21, 13:36 #5 Boulasse

    Bonjour,
    Dans cette même société ,je suis passé après un de leur technicien sur une MAJ DTA, et ce dernier avait statué sur la.presence d un flocage amianté sur Décision de l Opérateur, avec son etat etc,alors que le dit flocage était emmuré depuis plus de 20 ans a l.epoque,que l on ne pouvait le voir,il c.etait basé sur les dires d une personne (noté comme cela.dans.le.rapport)
    Il n y avait aucune preuve de la.présence ou non d un flocage derrière le.mur.

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